La statue animée : histoire italienne
Le marbre faisait place à sa somptueuse peau ivoire. Ses muqueuses, ses cheveux et ses yeux prenaient des couleurs. Une fois cette métamorphose de statue en humain opérée, il bougea ses pieds puis ses jambes et quitta son emplacement. Il se rapprocha lentement de la fenêtre de ma chambre, son allure était admirable et majestueuse. Une fois qu’il eût atteint ma vitre, il toqua au carreau. Je lui ouvris, il passa ses longues jambes à travers la fenêtre ouverte, puis bascula le reste de son corps dans la pièce à la force de ses bras. Après cet effort qui ne semblait pas en être un pour lui, il continua à s’approcher de moi. Il était si près que je pouvais distinguer toutes les veines de ses avant-bras. Il grimpa sur le lit à mes côtés et me parla pour la première fois en captivant mon regard : « Je te rencontre enfin, je t’attendais. ». Sa voix avait un timbre doux, apaisant et je comprenais la signification de ses paroles. Je m’entendis répondre : « Moi aussi, je t’attendais. » et il me prit fougueusement dans ses bras. Rougissant, je constatai avec pudeur sa nudité et me promis qu’à mon réveil, je lui achèterai un vêtement. Un humain n’était pas supposé vivre sans habit couvrant au moins ses parties génitales ! Une fois ma timidité envolée, je ressentis un sentiment de plénitude dans son étreinte, mon cœur s’emballa de nouveau et j’eus l’impression d’avoir de la fièvre. Mes membres tremblèrent de façon incontrôlée et des gouttes de sueur perlèrent sur mon front. L’homme me caressa doucement les cheveux comme pour m’apaiser mais cela empira mon état. Je lui intimai de s’éloigner de quelques centimètres tant mon émoi était intense et nous demeurâmes ainsi, s’observant simplement, jusqu’à la fin de mon rêve.
Je me réveillai sept heures plus tard emplie d’un bouleversement émotionnel et d’un sentiment de bien-être. Je tins ma promesse, j’allai acheter un sous-vêtement pour mon compagnon. À mon retour, je le posai dans ma chambre, à côté de la fenêtre, sur le dossier d’une chaise. J’avais peur que cela ne fonctionne pas, peur de m’être imaginé des choses. Je passai le reste de la journée à travailler dans mon atelier. Je partis dormir tôt dans la soirée. Son arrivée ne se fit guère attendre. Lorsqu’il jaillit de la fenêtre, le regard posé sur moi, je désignai avec mon index droit mon achat. Il se retint de rire devant ma gêne, pris le vêtement et l’enfila.
Mon expression rassurée lui indiqua qu’il pouvait désormais venir à moi. Il avança avec la lenteur et l’allure d’un mannequin pour me faire languir. Je retins mon souffle, impatiente, amusée et émerveillée. Un sourire énigmatique s’afficha sur son visage. Que comptait-il faire ? Je l’attendis, intriguée. Il sauta soudainement avec l’agilité d’un félin sur le lit, à mes côtés. Je fus si surprise qu’un petit cri s’échappa de ma gorge. Ma réaction le fit rire aux éclats. Je fus subjuguée par ce rire cristallin que j’entendais pour la première fois. Il n’était pareil à nul autre, tout comme le reste de ses caractéristiques d’ailleurs. Je ne pus résister à l’envie de l’étreindre et j’en profitai pour humer son odeur corporelle. Un festival sensoriel m’envahit tant elle était envoûtante et singulière, reconnaissable entre mille. J’étais complètement déstabilisée par cette intensité sensitive. Tous mes sens étaient sollicités. Il déposa un baiser sur mon front et me déclara de sa voix douce, un brin mélancolique : « Il est l’heure, je dois y aller. ».